ÉGLISE DE MADRE-DE-DEUS


CARREAUX CÉRAMIQUES HOLLANDAIS
AU PORTUGAL ET EN ESPAGNE
PAR
J.M. DOS SANTOS SIMÕES
LA HAYE 1959

p. 54-60

 

ÉGLISE DE MADRE-DE-DEUS

Si l'ancien couvent des Carmélites de Cardais et son église semblent avoir été voués à l'oubli, celui des Clarisses de Madre-de-Deus, au contraire, a joui, depuis sa fondation, des faveurs royales et de la plus grande popularité auprès des fidèles.
Fondé en 1509 par la Reine Dona Leonor - veuve du Roi Jean II et soeur de Manuel I - dans le faubourg de Xabregas, au bord du Tage, le vieux couvent fut bâti d'accord avec le goût de l'epoque - le Manuelino. Dans le cours des temps, les bâtiments subirent des modifications et des élargissements qui changèrent totalement son aspect primitif.
Les édifices conventuels proprement dits ont été adaptés en 1870 à un institut d'éducation pour jeunes-gens - Asilo Maria Pia - et l'église, desaffectée, fut commise à la garde des Monuments Nationaux. Dernièrement le Musée National d'Art Ancien prit à sa charge la conservation du temple, fit rétablir le culte et soigna les peintures et boiseries qui l'enrichissent.
L'eglise, telle que nous la voyons aujourd'hui, est le résultat des agrandissements du temps du Roi Jean III (vers 1550), des embellissements de Jean V (début XVIIIème siècle), des remaniements faits après le Grand Tremblement de terre (ca. 1760), et, finalement des travaux executés après 1870! De l'église manueline il ne reste presque rien: le portail n'est qu'une reconstitution assez romantique faite avec des débris de l'ancienne porte et selon à qu'on voit sur une table peinte de l'ancien retable, représentant l'entrée au Couvent de Madre-de-Deus des reliques de Sainte Aute, une des Onze Mille Vierges.
54

L'église de Madre-de-Deus n'en reste pas moins un des plus beaux monuments de Lisbonne où le public est attiré par la richesse de son intérieur, par les peintures du XVIème et XVIIIème siècle, par les boiseries dorées, enfin, par le carrelage dont les murs sont garnis.
Le revêtement céramique de Madre-de-Deus constitue un ensemble dont il est inutile de vanter l'excellence. Cependant le mérite de ces carreaux ne semble pas avoir été reconnu par ceux qui ont ecrit sur la matière et encore en 1924 le Guia de Portugal, dont les textes font autorité, les signale comme „modernes" et indignes d'attention.1
Il est vrai que deux panneaux sur le mur du fond de l'église ont été peints à la fin du XIXème Siècle par Pereira Junior, mais ils ne se confondent pas avec l'ensemble et ne nuisent point à l'effet décoratif général.
Une prudente méfiance est de bonne règle quand il s'agit de juger les travaux exécutés à Madre-de-Deus sous la direction de l'architecte José Maria Nepomuceno. En effet on ne lui pardonne pas quelques libertés prises lors de la reconstruction du petit cloître, où l’on voit une rame de chemin de fer décorer un chapiteau manuelino (!), et on connaît trop sa cupidité pour les oeuvres d'art qu'il n'hésitait pas à transférer des vieux bâtiments à sa maison de Santo Antonio da Convalescença, notament nombre d'azulejos … . Mais de là à croire qu'il remplaça tous les carreaux de l'église de Madre-de-Deus par des panneaux modernes il y a quand même un pas ...
Le corps de l'église est constitué par une nef et par le choeur où se dresse le maitre-autel. Les murs sont entièrement recouverts par la décoration usuelle à l'époque de Jean V: un haut lambris carrelé surmonté de toiles peintes, richement encadrées de boiseries dorées. Cette décoration existait déjà avant 1707, selon le temoignage toujours précis du Santuario Mariano, où le Frère Agostinho de Santa Maria, s'occupant des peintures, écrit que celles-ci ont été placées assez haut pour ne pas couvrir l'excellent ornement d'azulejos do norte, dont les murs sont garnis au-dessous des tableaux. 2
Nous savons donc que les carreaux du haut lambris étaient du nord, c'est à dire de Hollande, ce qui d'ailleurs ne laisse aucun doute, car ce sont bien les mêmes qu'on y voit aujourd'hui, et dont les caractères sont spécifiques.
Pendant les travaux du XIXème siècle, Nepomuceno enleva deux panneaux de carreaux qui étaient probablement sur des portes aujourd'hui disparues. Ces tableaux représentaient Saint Jérôme soignant le Lion et La fuite en Egypte, ayant respectivement 28 et 24 carreaux. Ces panneaux faisaient partie de la collection d'azulejos que Nepomuceno envoya à l'Exposition de Céramique de Porto, en 1882, et Joaquim de Vasconcellos les décrit comme

(1) Guia de Portugal, (édition de la Bibliothèque Nationale de Lisbonne), 1924, p. 315: ‘on monte à la nef, simple, revêtue d'un lambris d'azulejos modernes (Vie de Saint François), peu agréables comme tonalité et comme dessin’.
(2) Frei Agostinho de Santa Maria, Santuario Mariano, Vol. I, Lisboa 1707, p. 128.

55

étant hollandais et importés au milieu du XVIIème siècle.1 C'est aussi Vasconcellos qui le premier identifia les azulejos de l'église de Madre-de-Deus comme étant hollandais2 ce qui d'ailleurs ne fut pas admis par d'autres écrivains, notamment par José Queiroz qui les croit portugais3 ou par
Vergilio Correia qui les suppose être de Gabriel del Barco, sans faire la moindre allusion à leur origine néerlandaise.4
II faut reconnaitre que le revêtement de l'église de Madre-de-Deus est des plus difficiles à étudier car certains carreaux ont été deplacés, d'autres remplacés, quelques-uns restaurés et ceci dès le debut du XVIIIème siècle jusqu'au XIXème.
Malgré ces méfaits et quoique l'ensemble ne soit plus d'une integrité parfaite, il n'a pas perdu sa valeur artistique et reste toujours l’un des plus extraordinaires qui aient été produits en Hollande.
D'après ce qu'on voit aujourd'hui on ne peut pas déduire quel thème iconographique avait imposé la commande. Je crois même qu'il n'a pas été donné de thème et qu'on s'est borné à fournir les dimensions et les croquis des surfaces à recouvrir, en ajoutant certainement qu'il s'agissait d'un couvent de règle franciscaine. En effet les motifs des peintures ne semblent avoir aucun rapport entre eux, comme ce fut le cas pour l'église de Cardais, et leur distribution est tout ce qu'il y a de plus arbitraire - sujets religieux sans signification, sujets laïcs purement ornementaux.
Le carrelage du corps de l'église recouvre la partie inférieure des parois et est composé par de grands panneaux, limités par une bordure de deux carreaux de large, à rinceaux recourbés, se détachant en blanc sur le fond bleu. Ces panneaux n'arrivent pas au sol mais s'élèvent au-dessus d'un soubassement ou plinthe de cinq carreaux de hauteur qui leur sert de base.
En entrant dans l'église par le portail, on découvre sur le mur de droite - coté épître - la très belle chaire en bois sculpté, à elle seule un des plus remarquables motifs d'intérêt de l'église. Sur cette paroi s'étale le revêtement céramique, contournant la chaire et la petite porte qui lui donne accès. Le peintre a rempli le panneau de figures d'ermites dans un paysage fort simple. On remarque que la composition obéit aux accidents de l'architecture car dans la partie sous la chaire, il a adroitement placé au premier plan un tronc d'arbre coupé, ce qui donne de l'équilibre à l'ensemble; sur la bordure qui enveloppe la porte il a perché deux petits oiseaux, détail des plus charmants. À gauche de cette porte la composition est continuée par un groupe de trois ermites en prière.

(1) Joaquim de Vasconcellos, Ceramica Portuguesa, Série II, Porto 1884, p. 21. Ces mêmes carreaux sont décrits par Liberato Teiles, (Duas Palavras sobre Pavimentos, Lisboa 1856 p. 2.30,) comme étant hollandais, de 1645, et ayant appartenu à l'ancien Couvent de Madre-de-Deus. lls ont éte mis aux enchères après la mort de Nepomuceno selon ce que l'on lit dans le catalogue de la vente (Lisbonne 1897) où ils portaient le numero 156.
(2) Joaquim de Vasconcellos, Ceramica Portuguesa, Série II, Porto 1884, p. 22.
(3) Jose Queiroz, Ceramica Portuguesa, Lisboa 1907, p. 241. .
(4) Vergilio Correia, ‘Azulejos de Arraiolos’ dans Atlantida, Vol. V (1917), p. 574-580.

56

Le soubassement correspondant à ce mur est interrompu par la porte de la chaire. II est constitué par une frise de quatre carreaux de hauteur mais dont les caractéristiques sont totalement différentes de celles des carreaux du panneau. Entre le paravent d'entrée et la porte de la chaire, sur une longueur de 38 carreaux, cette plinthe montre des figures de petits anges jouant avec des fleurs et des paniers de fruits, au dessin plutôt incorrect et d'une teinte bleue beaucoup plus ternie que celle des carreaux du dessus. II est évident qu'il s'agit de carreaux de moins bonne qualité et d'une fabrication moins soignée qui n'ont rien à voir avec le reste de la décoration. Je n'ai aucun doute qu'il s'agisse d'azulejos peints à Lisbonne par Gabriel del Barco, tellement le style et la technique sont proches de ses travaux signés.
J'ignore pour quelle raison on eut recours au peintre de Lisbonne, mais je suppose qu'il a été appelé à compléter le carrelage là où manquaient les carreaux hollandais. Quoi qu'il en soit, les azulejos de Barco nous sont d'une aide précieuse, car ils permettent de fixer la date de ce travail entre 1691 et 1701, limites connues de son activité.
Au delà de la porte de la chaire encore, une partie du soubassement est remplie avec ce type d'azulejos, tandis que d'autres qui s'en suivent sont indéniablement hollandais.
Sur le mur du côté de l'évangile, face à la porte d'entrée de l'église, le revêtement se divise en deux grands panneaux.
À gauche, à partir du fond de la nef, une énorme composition représente l'apparition de Jéhovah à Moïse; le Patriarche, en berger, écoute la voix du Père qui jaillit de la montagne, entouré de flammes. Le troupeau de moutons, à gauche, ne semble pas être troublé par la vision, tandis qu'à droite une ville vaguement égyptienne s'étend le long d'un fleuve - le Nil (?) - d'où émerge un crocodile menaçant.
Ce panneau était plus étendu et on l'a morcelé en deux: la partie de gauche, y compris la tête d'un mouton, dont on voit le corps sur le panneau de Moïse, fut placée sur le mur d'en face, entre le paravent d'entrée et la paroi du fond. Il est donc évident que ce panneau fut déplacé, ce que l'on constate d'ailleurs en observant de près les carreaux: ils sont cassés et recollés, quelques-uns restaurés, d'autres probablement refaits en entier.
En étudiant les plans de l'église, antérieurs aux travaux du XIXème siècle, j'ai cru pouvoir déduire que le panneau de Moïse occupait toute la paroi du fond de l'église, alors qu'à l'endroit où il se trouve maintenant il y avait un autel enfoncé dans le mur.
Bien que le dessin soit correct, surtout dans le groupe d'animaux et dans le fond de paysage, il est hors de doute que l'ensemble manque d'unité artistique et technique: les bleus sont parfois trop forts et violents, les tracés trop rigides, les ombrages contrastés, les architectures sans élégance. Il n'est pas possible de formuler un jugement critique car nous ne savons pas jusqu'à quel point ce panneau est proche de 1'original.
Le panneau qui suit, par contre, est un véritable chef-d'oeuvre!
Long de plus de sept mètres il ne compte pas moins de 1196 carreaux, y compris la bordure

57

qui l'entoure. C'est une véritable tapisserie céramique, couvrant plus de 20 mètres carrés, en vérité le plus grand panneau qu'on connaisse de ce genre!
La composition est d'un équilibre parfait avec des premiers plans peints en bleu foncé pour rehausser les fonds de paysage et les architectures. Du côté gauche, un grand arbre limite le champ de vision et offre son ombre à un hallebardier qui nous tourne le dos. La moitié gauche de la composition est occupée par un bâtiment somptueux, de plan centré, surmonté de statues et dont le perron donne sur un beau jardin. En face du palais, la fontaine couronnée par une figure décorative, sert d'abreuvoir et d'ornement. De jeunes nobles se promènent, tandis qu'un cavalier, à demi-caché par le tronc de l'arbre, fait son entrée dans ce décor idéal.
La moitié de droite semble être dédiée aux plaisirs champêtres. Dans une clairière de forêt un berger joue de la flûte tout en exécutant un pas de danse, tandis qu'une bergère semble fredonner une mélodie qu'elle déchiffre dans un livre. Des vaches, des brebis et des chèvres complètent le cadre bucolique. Le seul personnage religieux - un ermite - est à moitié caché sous les buissons, dans le centre du tableau, un crucifix entre les mains.
Le dessin est d'une extrême correction jusque dans les moindres détails et particulièrement dans le modelé des figures. Le coloris, en plusieurs gradations de bleu, atteint dans ce panneau des subtilités inattendues dans ce genre de peinture céramique, depuis les tonalités très foncées des premiers plans, où cependant les détails ne se confondent point, jusque dans les feuillages et les sous-bois ou dans les lointains des jardins où le bleu se dissout et se perd dans le blanc du fond.
Les deux panneaux qu'on vient de décrire s'appuient sur la frise du soubassement; cette fois les carreaux sont tous d'origine, bien que d'une fabrication moins soignées que celle des panneaux proprement dits. Des puttialternent avec des satyres et quelques-uns portent des livres, des drapeaux ou des pancartes où l'on peut lire des inscriptions: Religieus, Gratia sit vobis & Pax, Estote Contenta Praesentibus, veriate (sic), Frates Orate Pronobis.
Entre le corps de l'église et le choeur, là où aurait été le maître-autel à la fin du XVIème siècle, avant qu'on ait prolongé l'église, on plaça deux autels latéraux, probablement à l'époque des grandes décorations — fin du XVIIème siècle. Entre ces autels et l'arc du choeur, contre le mur, furent disposés des revêtements céramiques. Seul celui du côté de l'évangile est complet avec des carreaux d'origine néerlandaise, alors que celui du côté de l'épître a été remplacé par des azulejos portugais, apportés ici probablement lors des travaux de ramaniement du XIXème siècle, et correspondant à un type courant de la seconde moitié du XVIIIème.
Le panneau original comporte 14 carreaux de large, avec leur bordure, sur une hauteur de 25 carreaux, y compris ceux de la frise du soubassement. Cette fois encore, le sujet ne semble pas avoir de rapport avec le reste des figurations. C'est en tout cas un thème tout à fait charmant que ces quatre figures de paysans, portant sur la tête ou sur le dos, des chevreuils,

58

des cages avec des poules, un mouton, une marmite. C'est un groupe probablement emprunté à une gravure montrant des paysans se rendant au marché ou même à une adoration de bergers.
La frise inférieure représente un cartouche flanqué de têtes de lions avec, au centre, un petit ange écrivant sur un livre; il faisait certainement pendant à la frise d'en face où l'on a conservé les lions, cette fois sans le cartouche.
Le choeur, séparé du corps de l'église par une suite de piliers, a les parois également carrelées. Ici les compositions sont moins hautes que celles de l'église - 18 carreaux - toujours entourées de la bordure de feuilles et s'élevant au-dessus de la frise-plinthe.
Du côté de l'évangile le panneau représente un Pape accompagné de deux évêques et s'humiliant devant un moine (Saint François d'Assise?) qui les reçoit à la porte du couvent; à droite une longue allée de grands arbres où se promènent des moines. C'est précisément ce paysage qui confère au panneau une valeur particulière, car il s'agit d'une très belle perspective rappelant les fugues bien connues d'Hobbema ou de Ruysdael.
La frise inférieure est charmante aussi: on y avait disposé dans des médaillons, les Cinq Sens, séparés par des guirlandes fleurs-fruits. Lors des travaux de Nepomuceno on a remplacé le sens de l'ouïe par des carreaux modernes, tandis que les quatre autres sens - le toucher, le goût, la vue et l'odorat - restent tels qu'ils étaient, importés de Hollande. Les motifs végétaux des guirlandes symbolisent les Quatre Saisons de l'année.1
Toujours du côté de l'évangile, près de la porte qui mène à la nouvelle sacristie, un panneau haut de 20 carreaux, montre un franciscain de grandeur naturelle qui, le doigt sur la bouche, impose le silence. C'est aussi une belle composition, d'un dessin très fin et minutieux. La frise inférieure, ajoutée plus tard, est formée d'azulejos portugais du XVIIIème siècle - vers 1740 - représentant des anges, peinture bleue de type conventionnel.
Le mur du côté de l'épître est ajouré de fenêtres s'ouvrant sur la rue. Entre celles-ci et remplissant les creux, on a placé deux petits panneaux, également entourés de rinceaux, avec des figures d'ermites. Le soubassement de ce mur est paré d'une frise où l'on a peint quatre allégories: ce sont, cette fois, les quatre Éléments personnifiés par de petits faunes, dont trois - le Feu, l' Air" et la Terre - sont d'origine hollandaise, tandis que celui qui aurait représenté l'Eau a été maladroitement remplacé au XIXème siècle par des carreaux portugais assez inférieurs comme qualité, où l'on voit une figure de faune portant des feuilles de vigne. II semble évident que lors de la commande de cette dernière composition on ne s'était pas rendu compte du symbolisme de l'ensemble.
II y a à Madre-de-Deus environ 6.000 carreaux hollandais mais il a dû y en avoir beaucoup plus avant les travaux de Nepomuceno. Que sont-ils devenus? On ne peut pas le dire mais

(1) Je me fais un plaisir de remercier M. Saldanha, le vieux guide de Madre-de-Deus, pour avoir attiré mon attention sur ce détail qui m'avait échappé.

59

il est presque certain qu'une partie au moins doit exister encore soit dans des collections privées, soit appliquée sur quelque édifice.
Ce qui reste cependant, est tel que cet ensemble sera toujours un des plus importants pour l'histoire de la céramique hollandaise.
Malheureusement je n'ai pas réussi a trouver de documents sur la commande de ces carreaux, les archives de l'ancien couvent ayant disparu. Tout ce que je peux ajouter c'est que le revêtement était déjà sur place avant 1707 et qu'il a du être installé vers 1690-1700. En effet la présence de la frise, que j'attribue à Gabriel del Barco, autorise cette présomption qui s'accorde d'ailleurs avec la typologie du carrelage. Si nous nous en tenons à 1700, comme terme moyen, on ne risque pas de trop s'écarter de l'époque probable où ces carreaux sont venus au Portugal.
Les compositions ne sont pas signées et ce n'est que par comparaison qu'on peut risquer des attributions artistiques. Tout d'abord il semble qu'il y ait lieu ici de penser à plus d'un artiste. Les panneaux des Ermites, par exemple, sont indiscutablement de l'auteur des revêtements maintenant à Séville et provenant de Cadix, et, on le verra, le même peut-être qui signa les carreaux de Nazaré - Willem van der Kloet. Par contre la composition de Moïse ne semble pas être de la même main, à moins qu'elle n'ait subi des restaurations trop profondes.
Le grand panneau du hallebardier, dont j'ai eu l'occasion de vanter la haute qualité artistique, pourrait être attribué à l'auteur du Triomphe de David : les têtes de chevaux sont en tous points semblables. Serait-ce aussi Van der Kloet? Je n'ose l'affirmer sans l'appui d'autres éléments d'identificati on et je préfère laisser le problème en suspens . . .
La bordure de rinceaux aussi est semblable à celle de Nazaré, mais là encore il s'agit d'un accessoire qui a pu être commun à plus d'un atelier. Par contre la frise des soubassements me semble avoir été dessinnée par un artiste moins doué que celui qui peignit les grands panneaux, peut-être un apprenti ou un petit maître travaillant à l'atelier.

60